Jour 13 - Séjour en pays Masaï
Ce matin, nous partons avec notre guide pour un petit safari. Mais cette fois, contrairement à mes visites dans le parc de Tarangire, de Manyara ou du Ngorongoro, nous y allons à pied. La zone ou nous allons est cependant saine vis à vis des fauves, car la présence proche de l'homme à faire fuire ces animaux. Nous suivons notre guide qui marche d'un bon pas. Depuis leur jeune âge, les masaïs sont habitués à marcher dans ces contrées pendant de longues heures parcourant de nombreux kilomètres. Il n'est pas rare qu'ils fassent 50km par jour pour mener leur troupeau jusqu'a des points d'eau. Et chose plus extraordinaire, ils arrivent à se déplacer par nuit noire sans difficulté malgré les arbustes épineux que vous trouvez partout dans la savane. Je peux vous dire que j'ai essayé et il me fut impossible d'avancer plus que quelques mètres.
Si vous regardez les chaussures de notre guide, vous pourrez constater qu'il s'agit d'un pneu de moto découpé à la taille du pied, le tout maintenu au pied par des lanières. Il m'a affirmé que c'était très confortable, et l'avantage de ce type de chaussure résidait dans la symétrie des empreintes (impossible de distinguer le sens de marche de Sembeke) ce qui procurait un gros avantage pour semer les prédateurs de la savane. Il sanctionna cette phrase par un clin d'oeil révélateur ! Il nous indique qu'elles sont aussi parfaites pour pratiquer les danses masaïs (pour sauter). Nous croisons par moment quelques troupeaux menés par des enfants masaïs (pendant mon séjour en pays masaïs je n'ai jamais rencontré d'adulte qui s'occupait des troupeaux) dans une poussière intense.
Au bout de quelques dizaines de minutes, nous distinguons une antilope-girafe, qui détale devant nous. Mais les animaux se font rare excepté quelques zèbres. Sembeke s'improvise photographe à ce moment.
Un safari à pied est bien sûr complètement différent d'un safari en voiture. D'une part parce que les kilomètres défilent bien moins rapidement et d'autres part parce qu'ici les animaux n'ont pas trop l'habitude de voir des humains, ils en ont donc peur. Impossible de s'approche de ce groupe de zèbre à moins de 50 mètres sans qu'ils ne partent au galop. La nature a encore des droits !
Dans cette région, pauvre, les ressources de la nature sont bien sûr exploitées au maximum de leur possibilité. Les masaïs y trouvent leurs remèdes. Notre guide s'arrête à proximité d'un arbre tout à fait banal. Il s'avère que cet arbre présente plusieurs propriétés fort intéressantes. D'une part, les racines, hachées menues sont un remède très efficace contre les problèmes gastriques. Avec 1 litre d'eau, vous réglez tout vos problèmes d'estomac. Avec 1/2 litre d'eau, vous vomissez sur le champ. La plante étant relativement forte, elle est déconseillée au femme enceinte.
Mais la plante a d'autres vertus. En effet, les tiges plus vertes peuvent servir de brosse à dent. Je me contenterais pour ma part de rester sur l'idée de la brosse à dent et du dentifrice, mais c'est vrai que j'ai des goûts de luxe !
Nous continuons notre marche dans la savane et nous tombons sur un jeune garçon qui garde son troupeau. Il possède dans ses mains deux bâtons. Le 1er bâton est fait de bois dur. Il lui servira plus tard pour asseoir son autorité sur autrui (mais jamais sans être pointé, il y a plus un rôle symbolique). C'est un symbole fort chez les hommes masaïs. L'autre objet est une sagaie. Les masaïs sont souvent armés, non pas pour combattre mais pour se défendre contre des attaques d'animaux. Généralement, ils sont un troisième bâton, fait de bois souple qui sert à guider leur troupeau.
Nous traversons ensuite une rivière complètement à sec. Les signes de la force des eaux sont bien présentes sur ces flancs. Notre guide nous indique qu'il s'agit de la rivière des anciens. Le nom de la rivière vient du fait que la rivière emporte chaque année durant la période des pluies plusieurs personnes qui ont un peu trop bu ! Cette rivière prend naissance à proximité de Nairobi, et va jusq'au Mawezi (le petit sommet que l'on avait vu depuis les pentes du kilimandjaro).
Notre guide s'arrête bientôt pour nous raconter quelques histoires de son pays. Les masaïs ont une croyance encore assez forte des superstitions et vont souvent consulter un marabout local pour savoir quoi faire si un problème survient. Gri-gri et autres choses de ce type sont placés dans le village, et notamment au niveau de la porte d'entrée pour éloigner les êtres malfaisants. Ces croyances sont encore bien vivaces même à l'heure actuelle. Cependant, Sembeke, semble-t-il plus ouvert d'esprit que la majorité, nous avoue avoir rejeté complètement ces croyances ancestrales et surtout les gri-gri qui visent à faire du mal à autrui. Il croit plus en la sagesse et l'intelligence des hommes que dans les jaloux qui souhaitent que leur vie change par le biais de méthodes douteuses.
Il nous raconte quand même cette histoire de jeunes guerriers masaïs qui voulaient voler le troupeau d'un village voisin. Allant voir un marabout, celui-ci leur indiqua la démarche à accomplir pour commettre leur acte sans risque, le village étant gardé par des hommes armés. Le marabout leur indiqua qu'ils devaient prendre le bus qui serait exceptionnellement gratuit, qu'ils arriveraient à rentrer dans le village sans encombre et qu'ils pourraient y voler les bêtes qu'ils désiraient. Il indiqua aussi que deux guerriers allaient repartir vers le village et y danser devant les yeux ébahis de la population locale et des hommes en arme. Ces derniers ne pourraient faire feu sur eux du fait de leurs armes enrayées. Ils pourraient ensuite revenir chez eux sans être inquiété du moins du monde. Sembeke nous indiqua que cette histoire se passa comme ce qu'avait prédit le marabout.
Une autre histoire similaire raconte que la région fut annexé il y a des dizaines d'années par le gouvernement, limitant le déplacement des populations. Cependant afin de développer la vie locale, le gouvernement y fit construire un puit, et y apporta une machine pour pomper l'eau plus facilement. Afin de lutter contre l'envahisseur, les masaïs consultèrent un marabout et celui-ci indiqua qu'ils devaient mettre un produit dans le puit pour faire fuire l'envahisseur. Ce qui fut fait, mais le produit contamina le puit, ce qui rendit l'eau impropre à la consommation pour les hommes et les troupeaux. Ces derniers moururent en nombre. Devant cette situation, le gouvernement fuya la région, la décrétant impropre.. Ce n'est que quelques années après, que les masaïs décidèrent de faire l'opération inverse en allant voir un marabout. Le puit fut de nouveau ouvert et propre à la consommation.
Nous partons maintenant voir ce fameux puit. Nous y trouvons la une grande animation avec d'un côté un groupe de femme et de l'autre un groupe d'hommes. Souhaitant prendre des photos, je demande à mon guide si je peux faire quelques photos du groupe des femmes (ils convient vis à vis des masaï de toujours poser la question de savoir si il est possible de prendre des photos, et de s'abstenir en cas de refus). Le guide me répond qu'il est tout à fait possible de prendre des photos. Mais les femmes sont hostiles à cette idée en le montrant par des gestes très explicites lorsque je sors mon appareil photo. Je m'abstiens donc par respect. Les hommes de leur côté ne sont pas contre cette idée et ce laisse facilement prendre en photo. Le problème c'est qu'une fois qu'ils ont dit oui, les masaïs se mettent à poser en attendant d'être pris en photo. Celles-ci sont alors forcément un peu moins naturelles.
Etant donné que nous sommes à un puit, un petit abreuvoir a été aménagé pour permettre aux animaux de boire. La pompe (à gasoil) est placée à quelques mètres de la.
Un peu plus loin, au pied d'un arbre, d'autres hommes masaïs, font passer le temps en discutant. Vous constaterez sur ce cliché que les masaïs possèdent des vélos. Il s'avère qu'a part les pied, c'est le mode de transport le moins cher et le plus répandu de la région.
D'ailleurs, l'aide de camp (prénommé Kurai) de Sembeke possède son propre vélo, ce qui est très utile pour aller à la ville voisine acheter quelques denrées en cas de manque. Il possède aussi une petite tente pour dormir. Il fut en effet le gardien de nos affaires jours et nuits.
L'après midi, chaud et sec, nous oblige à nous protéger du soleil le plus possible. Il n'est guère possible de se mouvoir à cet instant vu les conditions météorologiques. Mais la vie locale ne s'arrête pas et les troupeaux passent et repassent, les bêtes le nez dans la poussière. Même cette vache, les yeux fermés semble gênée !
Comme à l'accoutumée, les troupeaux sont conduits par les jeunes garçons. Ils sont rarement conduit par des hommes adultes qui préfèrent se prélasser à l'ombre des arbres. Ce ce cliché, si vous regardez bien vous verrez que ce garçon masaï porte bien trois objets dans sa main : sa sagaie, son bâton de garçon masaï, et son morceau de bois souple pour conduire ses bêtes. Sur cette photo, vous pouvez également voir la montagne de Longido en arrière plan, qui culmine à 2600 mètres environ.
La richesse des masaïs s'évaluent généralement en nombre de bêtes qu'il y a dans leurs troupeaux. Ici, le troupeau qui passe à proximité compte de nombreuses bêtes et il faudra de longues minutes pour les voir toutes passer.
Nous retournons vers le village local. En approchant du centre ville, je suis confronté à une situation amusante. Proche d'un petit marché local ou nous allions passer, notre guide est alerté par les gens de le présence d'un serpent à proximité. Aidé d'autres personnes, Sembeke va tenter par l'usage de pierres, puis de bâtons de tuer le reptile.
Je me retourne vers le véritable intérêt de cet endroit, le marché local. Quelques femmes, en habit traditionnel, tête rasée, proposent à la vente quelques objets locaux : bijoux, colliers, boucles d'oreille. Il n'y a pas grand monde dans ce village, et ces femmes ne feront pas recette, y compris avec les touristes.
Les produits sont apparemment réalisés sur place.
Les habits portés sont ici comme vous pouvez le voir, très coloré, plus coloré que les hommes, les enfants dans la savane (plus poussiéreux, plus sale, plus vieux aussi). Sans doute, pour mieux attirer le client ou juste pour se sentir belles. Les femmes portent des bijoux en nombre (et parfois les hommes, mais ce n'est pas toujours le cas).
Nous rentrons plus avant dans le village. Les hommes se promènent ou parlent en groupe. Les femmes vendent des produits. Nous croisons un atelier pour vélo, des moulins à grains pour faire de la farine. Le centre ville présente pas mal d'activité même si les boutiques sont bien sûr modestes.
Au centre ville, une marchande de fruits propose quelques fruits et légumes frais. C'est le seul magasin du village que j'ai vu proposant ce type de produit. Durant tous nos déplacements, notre guide n'arrête pas de parler aux personnes qu'il rencontre. C'était assez comparable à un candidat à une élection qui tente de capter des votes parmi la population. Il faut dire en fait que Sembeke est un homme très en vue dans la région, reconnu notamment pour son intelligence et sa sagesse.
De nombreux masaïs, viennent chercher des vivres avec leur vélo. Je saisis l'un d'entre eux, assis fièrement sur son destrier. Comme vous le voyez il porte son bâton de masaï malgré son mode de déplacement.
Notre guide est alpagué par nombre de personnes durant nos déplacements. Il rencontre de nouveau d'autres masaïs et nous rentrons à notre campement en leur compagnie. J'hésite un moment, et finalement je leur demande si je peux réaliser un cliché. Ils acquiescent mais uniquement si je leur promets d'envoyer la photo. Après le cliché, ayant un numérique, je leur ai montré, grâce au zoom, des gros plans de leur visage. Je ne sais pas si les masaïs ont l'habitude de se regarder dans une glace. En tout cas, ils n'étaient pas surpris, ni gênés de voir leur visage.
Nous rentrons au campement, et bientôt la nuit arrive.